Un juge américain a décidé dimanche 27 septembre de maintenir l’accès à TikTok sur les plateformes de téléchargement d’applications mobiles aux Etats-Unis (Apple Store et Play Store). Le réseau social reste ainsi téléchargeable et installable pour les Américains, malgré de précédentes annonces qui établissaient qu’au 28 septembre, TikTok devait être rendu inaccessible aux citoyens américains. Cette décision suspend de fait l’ordre donné par l’administration Trump, qui voit dans le réseau social appartenant au groupe chinois ByteDance une menace pour la sécurité nationale.
Quelques heures avant l’entrée en vigueur de la dernière décision du ministère du commerce, le magistrat Carl Nicholas a donné raison à TikTok, qui avait déposé un recours le 18 septembre. Il a en revanche pour l’instant refusé de suspendre l’interdiction totale de TikTok sur le sol américain, prévue pour le 12 novembre.
Les raisons de sa décision sont sous scellés afin de protéger des informations potentiellement confidentielles, mais doivent être publiées lundi une fois que les deux parties se seront mises d’accord. « Nous sommes satisfaits que la cour ait été d’accord avec nos arguments légaux et ait empêché la mise en place de l’interdiction », a réagi TikTok.
Risques pour la sécurité
Lors d’une audience par téléphone dimanche matin, ses avocats avaient déclaré que bloquer les téléchargements de l’appli serait inconstitutionnel et enfreindrait le droit à la liberté d’expression, surtout à l’approche de la présidentielle du 3 novembre.
« TikTok est bien plus qu’une application, c’est la version moderne du forum public, c’est une communauté, c’est un moyen de communication (…) d’autant plus important en temps de pandémie », avait fait valoir l’avocat John Hall dimanche. « Si l’interdiction entre en vigueur, c’est comme si le gouvernement empêchait les deux tiers du pays de venir à l’agora ».
La plateforme a aussi assuré que cela lui causerait des dommages irréparables en termes de croissance, alors qu’elle gagnait quelque 424 000 nouveaux utilisateurs américains par jour au début de l’été. Et l’interruption des mises à jour aurait pour conséquence directe, ironiquement, « d’éroder la sécurité » pour les 100 millions d’utilisateurs américains actuels, a ajouté M. Hall.
Le précédent WeChat
Le juge a accordé un répit à l’appli de vidéos musicales et humoristiques, fréquentée tous les mois par 100 millions d’Américains comme ce fut le cas il y a une semaine pour WeChat, un autre fleuron technologique fondé en Chine. Et il n’est pas exclu qu’un accord soit trouvé entre l’administration Trump et la maison mère chinoise de TikTok, ByteDance.
TikTok avait sollicité cette semaine un recours en urgence auprès du tribunal fédéral de Washington, assurant que son interdiction ne serait pas conforme à la Constitution du pays.
Au début d’août, Donald Trump a signé un décret pour forcer le groupe chinois ByteDance à vendre la plate-forme à une entreprise américaine, au nom de la menace pour la « sécurité nationale » – il accuse depuis longtemps TikTok d’espionnage sur ses utilisateurs au profit de Pékin, sans preuves.
Pas de preuve d’espionnage
Un dernier projet de vente, annoncé le week-end dernier, prévoit la création d’une nouvelle société, TikTok Global, impliquant Oracle en tant que partenaire technologique aux Etats-Unis et Walmart en tant que partenaire commercial. Il y aurait aussi une prise de participation de 12,5 % d’Oracle et de 7,5 % de Walmart. Les Américains détiendraient quatre des cinq sièges au conseil d’administration. Mais la finalisation de ce projet dépend du bon vouloir du président américain et du gouvernement chinois.
TikTok est en effet devenu le nouveau symbole de la bataille que se livrent les Etats-Unis et la Chine pour la domination du secteur des high-tech. Donald Trump accuse depuis des mois l’application d’espionnage au profit de Pékin par le biais de la collecte des données de ses utilisateurs – sans preuve.
Recours en urgence
Lundi 21 septembre, l’hôte de la Maison Blanche, en campagne pour sa réélection, avait martelé qu’il ne donnerait pas son aval si le nouveau groupe restait sous contrôle chinois tout en affirmant qu’Oracle et Walmart allaient posséder la majorité du nouveau groupe.
ByteDance, qui comprend des investisseurs américains, a qualifié ces informations « de rumeurs erronées ». Si les tractations n’aboutissent pas, une interdiction complète des activités de TikTok sur le sol américain pourrait entrer en vigueur à partir du 12 novembre, a prévenu le Trésor. Mais ByteDance a dit avoir effectué une « demande d’autorisation » d’exportation de technologie, sans préciser à quel sujet.
Cette initiative pourrait concerner le fameux algorithme qui a fait le succès de TikTok : il permet d’afficher aux utilisateurs les contenus les plus susceptibles de les intéresser, en fonction de leurs goûts, et de les conduire à passer le plus de temps possible à visionner des vidéos sur la plate-forme.
La Chine refuse que ce précieux système informatique ne tombe dans l’escarcelle américaine.
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