Cette fois, ils sont venus des quatre coins du pays. Des milliers de Géorgiens ont convergé vers Tbilissi, mercredi 1er mai au soir, pour manifester contre le projet de loi sur l’« influence étrangère », défendre les valeurs démocratiques et l’avenir européen de cette ancienne république soviétique du Caucase du Sud, plus menacée que jamais.
Le texte, calqué sur une loi russe visant à briser la société civile et les médias indépendants, a été voté au Parlement, le même jour, à 83 voix pour et 23 contre. Il doit encore passer en troisième lecture, et la présidente, Salomé Zourabichvili, a affirmé qu’elle y mettrait son veto, mais le parti au pouvoir, Rêve géorgien, dispose d’assez de voix pour ne pas en tenir compte.
Après trois semaines de manifestations pacifiques, les forces de l’ordre ont adopté la méthode forte, dans la nuit de mardi 30 avril à mercredi 1er mai, en réprimant violemment les rassemblements à coups de canon à eau et de gaz lacrymogène. Les vidéos et témoignages montrent également l’usage de balles en caoutchouc, ce qu’a nié le gouvernement. Des affrontements ont éclaté. Au moins soixante-trois personnes ont été arrêtées ; quatre manifestants et six policiers ont été blessés, selon les autorités.
Signe inquiétant, le président du Mouvement national uni, le principal parti d’opposition, Levan Khabeishvili, a été violemment battu par la police antiémeute. Mercredi soir, tandis que résonnait l’Ode à la joie, l’hymne de l’Union européenne (UE), la police a délogé à l’aide de gaz poivre et de canons à eau un petit groupe de manifestants qui tentaient de bloquer l’entrée latérale du Parlement.
Les condamnations se multiplient après les violences policières. Le département d’Etat américain a dénoncé un « recours à la force inacceptable » et sévèrement condamné le « discours mensonger » et « antioccidental » des autorités pour défendre leur projet de loi : « Les déclarations et les actions du gouvernement géorgien sont incompatibles avec les valeurs démocratiques qui sous-tendent l’adhésion à l’UE et à l’OTAN. »
Le haut représentant de l’UE pour les affaires étrangères, Josep Borrell, a lui aussi dénoncé le recours « inacceptable » à la violence. « La Géorgie est un pays candidat à l’UE, a-t-il rappelé. J’en appelle les autorités à garantir le droit de réunion pacifique. » La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dit suivre la situation avec une « grande inquiétude » et a condamné les violences. De son côté, l’eurodéputée Viola von Cramon-Taubadel a appelé à des « conséquences concrètes », dont le retrait du statut de candidat à l’UE, que la Géorgie a obtenu fin 2023.
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