Une nouvelle affaire de violences policières fait polémique outre-Atlantique, au point que le président américain, Joe Biden, a lui-même appelé au calme. A Memphis, dans le Tennessee, cinq policiers ont été inculpés et incarcérés, jeudi 26 janvier, à la suite de la mort, au début de janvier, de Tyre Nichols. Cet Afro-Américain de 29 ans est mort quelques jours après son arrestation, que sa famille juge brutale, selon des documents judiciaires.
D’après le registre de la prison du comté de Shelby, ces agents de la police de Memphis, qui sont eux-mêmes afro-américains, sont visés par plusieurs chefs d’accusation, dont meurtre, coups et blessures et enlèvement.
Le 7 janvier, des policiers avaient interpellé Tyre Nichols pour une infraction au code de la route. Alors que les agents s’approchaient, une « confrontation [avait] eu lieu » et « le suspect s’[était] enfui », ont affirmé les forces de l’ordre dans un communiqué. Tyre Nichols avait finalement été arrêté, mais il s’était plaint d’avoir du mal à respirer, et avait été hospitalisé. Il est mort trois jours plus tard.
Les circonstances de cette arrestation restent incertaines. Une vidéo des faits devrait être rendue publique dans les prochains jours. Selon les avocats de la famille de Tyre Nichols, qui ont pu consulter les images, « la police l’a battu au point qu’il était méconnaissable ».
Ce qui s’est passé est « inadmissible » et « criminel », cela « n’aurait pas dû se produire », a martelé David Rausch, directeur du bureau d’enquête du Tennessee, se disant « choqué » et « écœuré » par ce qu’il a vu. « En un mot, c’est absolument épouvantable. »
Le souvenir de George Floyd ravivé
Cette affaire trouve un écho particulier aux Etats-Unis, encore marqués par la mort de George Floyd, en mai 2020, et les manifestations contre le racisme et les violences policières, aux cris de « Black Lives Matter » (« les vies noires comptent ») qui s’étaient ensuivies.
Les avocats de la famille de Tyre Nichols, dont le célèbre Benjamin Crump – qui avait représenté la famille de George Floyd – ont salué l’inculpation des policiers. Cette nouvelle « nous donne de l’espoir alors que nous continuons à réclamer justice pour Tyre », ont-ils commenté.
Les cinq agents inculpés ont été démis de leurs fonctions la semaine dernière. L’enquête interne de la police avait démontré qu’ils avaient fait usage de la force de façon excessive. D’autres policiers font encore l’objet d’investigations.
Les agents mis en cause sont « directement responsables des violences physiques commises sur M. Nichols », a déclaré mercredi la cheffe de la police de Memphis, Cerelyn Davis, estimant qu’il ne s’agissait « pas seulement d’une erreur professionnelle mais d’un manque d’humanité ». « Cet acte était odieux, irresponsable et inhumain. »
« Je m’attends que vous soyez scandalisés [en voyant les images de l’arrestation de Tyre Nichols] », a admis Mme Davis, qui est également afro-américaine. La vidéo de l’arrestation sera rendue publique vendredi soir. Jugeant également probable l’organisation de manifestations, la cheffe de la police a appelé à ne pas « inciter à la violence ou à la destruction ».
Pas de réforme ambitieuse
« Au moment où les Américains portent le deuil, où le ministère de la justice mène son enquête, et où les autorités continuent leur travail, je me joins à la famille de Tyre en appelant à des manifestations pacifiques. La colère est compréhensible, mais la violence n’est jamais acceptable », a déclaré Joe Biden dans un communiqué, réclamant également une « enquête rapide, complète et transparente » sur ce drame. « Nous ne pouvons ignorer le fait que les interventions policières mortelles ont davantage touché les personnes noires », a rappelé le président américain.
L’élu démocrate exhorte le Congrès à voter pour un projet de loi de réforme de la police, adopté à la Chambre des représentants en 2020 mais qui n’a pas passé l’obstacle du Sénat.
Depuis le meurtre de George Floyd, le Congrès américain a été incapable d’adopter la moindre réforme ambitieuse de la police, ne serait-ce que l’interdiction des prises d’étranglement.
Le président de l’organisation de défense des droits civiques NAACP, Derrick Johnson, a pour sa part appelé les élus du Congrès à regarder la vidéo de l’arrestation, puis à agir. « Nous pouvons nommer toutes les victimes de violences policières, mais nous ne pouvons pas citer une seule loi que vous avez passée pour régler le problème. »
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