Le gouvernement de Justin Trudeau a donné, mardi 18 juin, son accord à la relance des travaux d’agrandissement de l’oléoduc Trans Mountain (TMX) vers la côte ouest canadienne. Avant même la décision, un tiers des matériaux nécessaires à la construction du mégaprojet avait déjà été déchargé sur son trajet, preuve que l’accord d’Ottawa ne faisait guère de doute.
M. Trudeau souhaite que la construction débute d’ici aux élections législatives du 21 octobre. Pour le premier ministre, il s’agit d’améliorer son image dans l’Ouest canadien, où le chef de file conservateur, Andrew Scheer, a la faveur des électeurs. Les travaux doivent durer trois ans pour un coût de 7,4 milliards de dollars canadiens (5 milliards d’euros).
L’ambition est de tripler la capacité d’un vieil oléoduc transportant sur 1 150 kilomètres 300 000 barils par jour de pétrole issu des sables bitumineux d’Edmonton (Alberta) à Burnaby, en banlieue de Vancouver (Colombie-Britannique). Une hausse qui entraînera aussi celle des émissions de gaz à effet de serre du pays.
Qualifiant le Canada de « vulnérable » du fait que 99 % de ses exportations de pétrole et de gaz sont destinées aux Etats-Unis, M. Trudeau a rappelé que ces ressources y étaient vendues au rabais et qu’il était crucial de diversifier les débouchés, notamment en Asie.
« Hypocrisie »
La décision survient au lendemain du vote, à l’initiative du gouvernement canadien, d’une motion proclamant l’« urgence climatique nationale ». M. Trudeau a estimé mardi qu’il fallait « bâtir une énergie plus verte », annonçant que les 500 millions de dollars canadiens par an générés par les ventes de TMX seraient investis dans « la transition écologique du Canada ».
Patrick McCully, directeur de programme au Rainforest Action Network, dénonce cette « hypocrisie » : « C’est comme déclarer la guerre au cancer et ensuite faire la promotion du tabac. » A la Fondation pour la nature David-Suzuki, on estime que « la capacité du Canada à répondre à la crise climatique » est remise en cause.
Applaudie par le lobby pétrolier et le gouvernement conservateur d’Alberta, la décision de M. Trudeau ravive l’opposition au projet chez les écologistes, en Colombie-Britannique et au sein des Premières Nations. Le gouvernement de Colombie-Britannique estime que l’oléoduc va à l’encontre de son plan climatique et qu’il se traduira par une hausse du trafic maritime accroissant les risques d’accidents.
Avec des groupes autochtones et écologistes, il a obtenu, en août 2018, de la Cour fédérale d’appel que l’Office national de l’énergie (ONE) revoie son évaluation environnementale et reprenne les consultations avec les communautés installées sur le tracé de Trans Mountain.
L’ONE a obtempéré et formulé, en février, des recommandations pour atténuer les risques liés au transport maritime, aux déversements, à une hausse des émissions des gaz à effet de serre et au risque en termes de biodiversité, notamment pour les mammifères marins. Ottawa a, de son côté, lancé des consultations intensives avec les communautés autochtones. M. Trudeau souhaite qu’elles en « tirent profit » et voudrait leur céder une part des revenus à venir ou du capital de TMX.
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