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En Russie, le recrutement des prisonniers dans l’armée pour aller combattre se généralise

Une loi adoptée fin mars permet aux personnes suspectées de crimes d’échapper à une condamnation en rejoignant le front ukrainien. Le nombre de détenus déployés en Ukraine pourrait atteindre 150 000.

Par  (Moscou, correspondant)

Publié le 23 avril 2024 à 05h40, modifié le 23 avril 2024 à 09h55

Temps de Lecture 5 min.

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Des soldats russes en Ukraine, sur une image extraite d’une vidéo publiée par le ministère russe de la défense, le 9 avril 2024.

On peut seulement deviner la surprise d’Oleg Orlov lorsque l’administration pénitentiaire lui a mis entre les mains le marché suivant, mi-mars, quelques jours après sa condamnation pour « discréditation de l’armée » : plutôt que de purger sa peine de deux ans et demi de prison, s’engager dans l’armée pour combattre sur le front ukrainien.

Ni l’âge (70 ans) du défenseur des droits humains et cofondateur de la célèbre ONG Memorial, dissoute en décembre 2021, ni son statut de farouche opposant à la guerre n’ont découragé les recruteurs. La presse officielle russe, en évoquant l’anecdote, a confirmé que la procédure était parfaitement régulière, et que le contrat était proposé à chaque détenu.

La disparition du groupe de mercenaires Wagner, qui s’était fait une spécialité du recrutement en prison, n’a en rien fait disparaître la pratique. Avant même la mort de son chef et fondateur Evgueni Prigojine, en août 2023, cette prérogative avait été récupérée par le ministère de la défense. Depuis, plusieurs textes normatifs sont venus l’encadrer.

La dernière loi en date, adoptée par la Douma le 19 mars, achève de fixer les contours du recrutement dans les lieux de détention. Principale innovation : la possibilité offerte aux prévenus de s’engager avant même qu’une condamnation soit prononcée, la signature d’un contrat avec l’armée ayant pour conséquence immédiate un arrêt des poursuites et même de l’enquête.

Le texte grave également dans le marbre une pratique constatée depuis plusieurs mois sur le terrain : il n’est plus question d’une grâce présidentielle obtenue au bout de six mois de service, mais d’une « libération anticipée sous condition » avalisée par un juge, qui ne peut se traduire en libération définitive qu’à la fin de la guerre. Sur ce point, les détenus sont désormais à égalité avec les civils mobilisés en septembre 2022, à qui aucune perspective de retour n’est offerte.

Seuls les prisonniers ayant reçu une médaille ou ceux dont la blessure les empêche de poursuivre leur service peuvent espérer rentrer chez eux. Possibilité offerte à la corruption, assurent des experts, qui soulignent également un flou dans la rédaction de la loi : il n’est nulle part précisé que le criminel doit aller au front, mais seulement qu’il doit signer un contrat. Ceux qui ont des relations pourront donc rester à l’arrière.

Violeurs et meurtriers bienvenus

Plusieurs fonctionnaires, élus locaux, ou entrepreneurs accusés de corruption, ont d’ores et déjà dit vouloir « racheter leur culpabilité par le sang », selon l’expression employée en novembre 2023 par le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov. Plus original, le mari d’une blogueuse célèbre accusée de fraude fiscale, Elena Blinovskaïa, a annoncé s’engager pour « réhabiliter » sa femme et lui obtenir la clémence des juges. Il s’est avéré qu’il avait rejoint une de ces unités pour VIP, et assemble des drones.

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