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Brexit : le discours solennel et surréaliste de la reine

Elizabeth II a présenté lundi le programme de son gouvernement : une liste de mesures conditionnée à un hypothétique divorce d’avec l’Union européenne, le 31 octobre.

Par  (Londres, correspondante)

Publié le 14 octobre 2019 à 15h01, modifié le 15 octobre 2019 à 10h12

Temps de Lecture 3 min.

La reine Elizabeth II donne un discours à la Chambre des lords à Westminster le 14 octobre.

Toute la pompe de la monarchie parlementaire britannique était au rendez-vous, lundi 14 octobre, pour ce moment fort de la vie démocratique nationale : le « discours de la reine ». Elizabeth II a inauguré une nouvelle session parlementaire – la précédente ayant duré deux années, et s’étant achevée au tout début d’octobre –, en lisant le programme du gouvernement Johnson, depuis la Chambre des lords, à Westminster.

Le « speech » a duré moins de dix minutes, égrenant un catalogue de vingt-six futures lois, allant du durcissement des règles migratoires au renforcement des peines de prison en passant par l’amélioration du système de santé public.

Le moment fut certes solennel, mais totalement surréaliste, cette liste de mesures étant pour partie conditionnée à un hypothétique divorce d’avec l’Union européenne (UE) pour Halloween et le premier ministre, Boris Johnson, n’ayant plus de majorité pour espérer faire adopter aucun texte à la Chambre des communes.

En 2017, lors du précédent discours, Elizabeth II portait un ensemble bleu et un chapeau piqué de fleurs jaunes : les commentateurs s’étaient empressés d’y voir un clin d’œil appuyé aux valeurs européennes. Cette année, la reine, 93 ans, portait une robe d’apparat immaculée, sans référence voulue (ou fortuite) au drapeau étoilé. Et c’est par cette phrase définitive, qu’elle a entamé son « speech » :

« La priorité de mon gouvernement a toujours été de sécuriser le départ du Royaume-Uni de l’UE le 31 octobre. »

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Nouvelles règles

La couronne impériale posée sur un coussin à sa droite (elle pèse un kilogramme et se fait lourde), le prince de Galles assis à sa gauche, la souveraine a annoncé d’une voix sourde et monocorde sept projets de lois directement liées au « withdrawal agreement », l’accord de retrait, toujours pas finalisé entre Londres et Bruxelles. Il s’agit de nouvelles règles concernant l’agriculture, la pêche, le commerce, mais aussi l’immigration.

« Une loi sur l’immigration mettra fin à la liberté de mouvement, et posera les bases d’un système d’immigration plus juste, moderne et global », a ajouté la reine, toujours au nom du gouvernement britannique. Cependant, « mon gouvernement reste engagé à ce que chaque résident européen, qui a construit sa vie et tant apporté au Royaume-Uni, ait le droit de rester ».

La ministre de l’intérieur, Priti Patel, très à la droite des conservateurs, planche depuis plusieurs semaines sur un texte inspiré du système australien, censé attirer les « hauts potentiels » et limiter l’arrivée au Royaume-Uni des travailleurs à faibles revenus.

Ce « speech » devrait occuper les députés à la Chambre des communes pendant toute la semaine à venir. Les débats promettent d’être intenses, même si les travaillistes pourraient reprendre à leur compte certaines des propositions du gouvernement conservateur, notamment celles liées à l’environnement et le plan d’investissement à long terme dans le NHS (National Health Service), le système de santé publique britannique.

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L’offensive de l’opposition a commencé, alors que la reine avait à peine quitté Westminster. « Ce discours est une distraction coûteuse et absurde », a asséné Joanna Cherry, députée du Scottish National Party (SNP, parti indépendantiste), farouchement opposé au Brexit.

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Vote négatif ?

Il est même probable que le « speech » se soldera par un vote négatif à Westminster. Pour la première fois… en quatre-vingt-quinze ans. Une telle sanction, si elle se confirme, devrait logiquement aboutir à la démission du premier ministre, l’approbation du discours de la reine étant considérée comme « un test de la capacité du gouvernement à disposer de la confiance du Parlement », rappelle le think tank Institute for Governement.

Mais depuis le Brexit, la normalité n’est plus la règle à Westminster, et Boris Johnson a très peu de chances d’être démis. Il faut deux tiers des voix aux Communes pour gagner un vote de défiance, et pour le moment les travaillistes refusent de déclencher l’offensive, de peur de se faire laminer aux élections générales qui s’en suivraient.

Mais la journée la plus importante à Westminster sera celle de samedi 19 octobre. Les députés devraient siéger durant une partie du week-end, pour la première fois depuis la guerre des Malouines, afin de statuer sur le résultat du Conseil européen des 17 et 18 octobre. Il s’agira d’approuver un accord de divorce, si Boris Johnson en ramène finalement un de Bruxelles. Soit, dans le cas contraire, de l’enjoindre d’obéir au « Benn Act », le texte qui l’oblige, ce jour-là, en l’absence d’accord européen, à réclamer un report du Brexit aux Vingt-Sept.

Les élus pourraient aussi tenter de forcer le destin du pays en conditionnant l’approbation de l’accord à un deuxième référendum… Un « mega Brexit day » annoncent déjà les commentateurs.

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