Trilla, Pyrénées-Orientales. L’Espagne n’est pas loin, le pays catalan, à quelques bornes. Vignes, pâturages, arbres fruitiers en fleurs, chênes-lièges et friches longent la route qui monte pour atteindre le village de 85 âmes.
En venant de Perpignan, il suffit de prendre quelques mauvais chemins pour passer sous certaines des trente-cinq éoliennes de l’Ensemble éolien catalan installé par EDF en 2016, à Pézilla-la-Rivière, et entendre le souffle des pales.
Un peu moins d’une heure plus tard, arrivée à Trilla. A l’intérieur de la mairie, la liste des présidents de la République s’est arrêtée à Jacques Chirac. Ce vendredi 21 février, trois heures durant, trois jeunes agents d’une société éolienne, Abo Wind, tentent de contenir la colère des riverains lors d’une permanence d’information sur un projet à l’étude, enclenché il y a deux ans par un vote au conseil municipal.
Pour qui a l’habitude, cette séance, malgré des éclats de voix, se passe « bien ». « Il y a des collègues qui sont parfois obligés de fermer la permanence et d’appeler la police », remarque-t-on à titre de comparaison au sein d’Abo Wind.
« Le consensus autour de l’éolien est en train de nettement s’affaiblir dans notre pays », reconnaissait le président de la République Emmanuel Macron le 14 janvier, lors d’une table ronde sur l’écologie à Pau. A Trilla, confetti sur la carte de l’Occitanie, troisième région éolienne française en nombre d’installations (191), loin derrière les Hauts-de-France (439 installations) et la région Grand-Est (367), cela sonne comme un euphémisme.
« Nous ne sommes pas des égoïstes »
Dans l’étroite salle de mairie, une quarantaine de personnes, des membres de collectifs anti-éoliens locaux et départementaux, des habitants du village, le maire et ses affidés.
« Nous ne sommes pas des égoïstes, même si c’est vrai, nous partons d’une émotion, la colère, contre ces ventilateurs pourris devant le Canigou [point culminant emblématique du département] ! », s’explique un des « anti », Bernard Faux. « Ceux qui sont contre l’éolien, mettez-vous là », ajoute-t-il, déclenchant un petit mouvement de foule. « Il y a ceux qui sont contre et ceux qui sont pour. » Et le camp du maire de lui répondre : « Il y a ceux qui ont la lumière et il y a ceux qui ne l’auront pas ! »
Parmi les « anti », il y a des néoruraux – certains vivent « en autonomie » en bordure du village –, des retraités et autres acteurs d’un tourisme vert, loin des plages d’Argelès-sur-Mer. Leurs arguments – arnaque économique au profit de multinationales lointaines, destruction de la biodiversité dans ce couloir d’oiseaux migrateurs, destruction des paysages et du foncier, argument sanitaire – font face à des considérations simples.
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